Un peu loin des mouvances et des réseaux à tout prix, j'ai toujours travaillé malgré moi et naturellement sur les choses de la vie. Vaste méli-mélo. Sur des histoires ordinaires: échos sur le temps qu'il fait, ressentis, états d'âme, souvenirs, rêves, paysages, sensibleries... qui s'infusent en moi et qui me nourrissent en douce. Comme les sapins blancs de neige, la belette solitaire, les constellations, les refuges, le silence, la chute du mur, l'abandon, la détention ou le tir aux pigeons...

Avec le réel comme point de départ, je construis. En mode matériel restreint. Avec des restes, du soit disant quelconque, des fragments de vies oubliés: un rien perdu, usé, du rebut consommable... Listes de courses piétinées, bâtonnets de sucettes abandonnés, morceaux de murs démantelés, flotteurs échoués, mie de pain comprimée...

Comme j'achète une bouteille de vin parce que j'aime l'étiquette ou que je choisis un livre car le titre me fait déjà voyager, je repère et recueille des éléments prétendus pauvres et dénués d'intérêt. Ils deviennent mes réservoirs précaires, mes modestes dépourvus qui me font réparer. En somme, de l'ordinaire indispensable.

Avec ces carburants, je fabrique comme une enfant des mondes fragiles à l'esthétique faussement "poétique". Tantôt minuscules, parfois imposants. J'établis des associations spontanées entre le dessin, l'écriture, la peinture et le volume en laissant de la place à la pertinence du hasard. Moyennant respirations et temps de pause. Les éléments et les pratiques se rencontrent, en confluence: confrontation, assemblage, traits d'union. Ces terrains de jeu et territoires d'expérimentation deviennent des lieux de convergence lorsque tout s'articule et fait sens. Lorsque l'espace est occupé, ponctué, imprégné, manœuvré, signifié, signifiant, adopté. Quand tout s'installe progressivement dans le champ de la narration.

Mon travail parallèle d'intervenante me permet de partager la pratique des arts plastiques auprès d'enfants, d'adolescents et d'adultes dans différents milieux.