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LES ENFANTS DU SABBAT IX

Chercher enfin nos ciels

Cette installation spécifique d'Edwige Ziarkowski, à la fois concentrée et ouverte, fonctionne sur une douce tension. Tension entre l'image d'un certain confort bourgeois (fresques murales, décorations festives, fauteuil cosy) et la dureté d'un sujet brûlant : celui de la peine de mort aux États-Unis.

Tout ici tient sur un équilibre instable, sur le mode du paradoxe entre évocation de paysages naturels, quiétude domestique, célébration vernaculaire d'une Amérique profonde et la violence latente du châtiment irréversible, résurgence anachronique du far West, fureur potentielle prête à éclater.

A travers sa référence au Nebraska, le dernier des États américains à utiliser la chaise électrique (jusqu'à cette année), l'artiste propose un jeu sensible basé sur des liens multiples entre ses différents éléments. Le fauteuil planté d'allumettes (opérant formellement comme une ornementation  " pompière ") est une allégorie grinçante de la chaise électrique, dont les couleurs incandescentes renvoient au champ de coquelicots représenté sur le mur, mais aussi aux bougies d'anniversaire célébrant les 118 années d'exécutions dans l'état.

Les mains posées au sol le long du mur, formant en langage des signes la phrase titre de l'installation, renvoient possiblement au mutisme, à l'indicible de la situation, voire aux signes que les femmes échangent parfois à distance avec leur conjoint prisonnier. Mais elle est ici au service d'une poésie immédiate, discrètement sauvage, expression de l'urgence et de la nécessité. Cette fausse langueur naturaliste, contaminée par une cruauté latente, sans cesse sur le point de s'embraser, habite avec pertinence cet espace

contraint du Creux de l'enfer, dont la topographie, comme les couloirs de la mort, dessine une perspective emblématiquement rétrécissante.

 

Guillaume Désanges

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